19/03/2024

Lettre ouverte à Ary CHALUS, Président du Conseil Régional Jean-Marie, HUBERT Président de la Commission Agriculture, Pêche et Développement rural

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Lettre ouverte à Ary CHALUS, Président du Conseil Régional

Jean-Marie, HUBERT Président de la Commission Agriculture, Pêche et Développement rural

        La municipalité de Petit-Bourg a décidé la création d’un terrain de golf sur le territoire de la commune.

        Cette décision, portée à la connaissance des Guadeloupéens a provoqué un vif émoi et suscité une immense protestation qui a fait écho et a déferlé dans toutes les communes de Guadeloupe. La pétition mise en ligne par le Collectif que nous formons, pour s’opposer à cette opération jugée scandaleuse a recueilli à ce jour plus de 3600 signatures, accompagnées souvent de virulentes dénonciations et d’exhortations à une mobilisation pour faire obstacle à ce projet « monstrueux ». Les explications fournies par le maire de Petit-Bourg ont été perçues comme des contorsions fort maladroites, et n’ont fait qu’accroître le mécontentement grandissant.

        Cependant, pour l’heure, l’exécutif régional est resté silencieux et d’une discrétion qui peut surprendre. Il n’a fait connaître sa position, ni par la voix du Président Ary CHALUS, ni même par celle du Président de la Commission Agriculture, Pêche et Développement rural, Jean-Marie HUBERT, sur un projet qui pourtant concerne non pas seulement la commune de Petit-Bourg mais bien la Guadeloupe toute entière. Vous comprendrez alors que ce silence nous laisse quelque peu dubitatifs. C’est ce qui explique notre interpellation publique d’aujourd’hui.

        Monsieur le Président Ary CHALUS

        Monsieur le Vice-Président Jean-Marie HUBERT

Nous rappelons qu’il s’agit de la construction d’un terrain de golf sur plus de 120 hectares, intégré dans un complexe global (hôtel de luxe et autres structures annexes d’accompagnement). L’impact sur le foncier avoisinerait bien 200 hectares.

Nous rappelons qu’une grande partie de ces terres sont propriété d’un Groupement Foncier Agricole (GFA) regroupant des agriculteurs installés dans la cadre de la dernière réforme foncière des années 1980.

Nous rappelons que cette Réforme Foncière qui sur l’ensemble du territoire guadeloupéen portait sur 11000 hectares du portefeuille de la SAFER, avait pour objectif notamment le maintien d’une production cannière minimale, et la préservation des terres agricoles de toute spéculation au moyen du dispositif GFA interdisant l’aliénation du foncier. Monsieur Jean-Marie HUBERT en tant qu’ex-cadre du Crédit Agricole en sait long à ce sujet.

Nous rappelons que cette réforme foncière sur la commune de Petit-Bourg a porté sur 1200 hectares (800 en colonage et 400 en Faire Valoir Direct) donnant naissance à Deux (2) GFA : Vido et Bwa Vince.

Cette décision de la municipalité de Petit-Bourg, quel que soit l’angle sous lequel on l’examine, est manifestement inopportune. Elle fait craindre des intentions inavouées, tant elle est irraisonnée.

Il nous semble qu’une municipalité, qui plus est dirigée par un maire exerçant dans le même temps la fonction de 1er Vice-Président de la Collectivité Régionale, ne peut raisonnablement décider seule, sans concertation avec l’exécutif régional d’engager un tel projet.

Alors dites-nous Monsieur le Président de Région Ary CHALUS et Monsieur le Vice-Président Jean-Marie HUBERT si vous avez été saisi en amont de ce projet communal ? Avez-vous donné votre aval parce vous auriez admis in fine que la décision de la municipalité de Petit-Bourg est conforme à la stratégie régionale en matière de développement et de tourisme ? Est-ce à dire que toute autre commune aurait pu avant celle de Petit-Bourg voire après elle, porter elle aussi un tel projet sans en référer à quiconque ?

Dites-nous si ce projet est compatible avec le Schéma d’Aménagement Régional(SAR), ou alors si celui-ci aurait subi une modification uniquement afin de permettre la réalisation de ce projet de golf.

Chacun a entendu le maire de Petit-Bourg s’épancher sur les ondes de radio et télévision, expliquant qu’il a compensé la perte de terrains agricoles en réintroduisant dans le PLU plus de 300 hectares, et jurant la main sur le cœur qu’il aimait les agriculteurs.  Mais ceux qui sont renseignés savent aussi qu’il s’agit d’une démagogie et d’une supercherie pour tromper ceux qui ne le sont pas. Pourquoi ?

Une démagogie, parce que ce n’est pas de sa propre volonté qu’il a du s’y soumettre mais bien parce qu’il s’agit d’une obligation réglementaire à laquelle il ne pouvait échapper. D’ailleurs il semble bien que parce qu’il n’avait pas respecté cette obligation, le PLU de la commune avait été rejeté.

Une supercherie parce qu’il a dû « reclasser » ici et là, sans avis d’ailleurs et au grand dam de leurs propriétaires, de multiples petites parcelles pour « faire le compte ». L’agriculture n’en tire aucun bénéfice !

Dites-nous Ary CHALUS et Jean-Marie HUBERT, s’il est vraiment raisonnable et responsable de sacrifier près de 200 hectares de terres non chlordéconnées pour un projet à rentabilité incertaine. N’est-ce pas une criminelle provocation d’agir ainsi, au moment même où la superficie des terres cultivables diminue à cause de la spéculation foncière et à cause de la chlordécone, cette catastrophe économique et sanitaire à laquelle notre pays et nos agriculteurs doivent faire face.

Dites-nous alors comment ce choix inimaginable pour ceux qui s’inscrivent dans cette logique de « changer d’avenir » peut-il être compatible avec la croissance verte prônée par l’exécutif régional, alors même que ceux qui connaissent les lieux en connaissent également la richesse, en faune, flore, biodiversité. Dites-nous si cette hérésie est compatible avec votre volonté affirmée de nous orienter vers une plus grande autonomie alimentaire. Comment donc justifier cela ? Comment défendre cette folle entreprise ?

Dites-nous quel langage vous tiendrez désormais à ces dizaines de jeunes Guadeloupéens pour l’insertion desquels vous plaidez journellement ! Que dire à ceux qui sont depuis des années à la recherche de terrains pour s’installer comme agriculteurs et sortir de l’impasse et des affres du chômage ?

Monsieur le Président Ary CHALUS

Nous connaissons votre engagement pour la jeunesse et pour l’intérêt général du pays. Vous dites savoir « faire la part des choses » ; savoir privilégier l’intérêt général plutôt que celui d’un individu, d’une commune, d’un parti. Dites-nous alors si vous approuvez ce choix, cette option, cette décision de la municipalité de Petit-Bourg qui offensent la raison et l’éthique de responsabilité ?

Monsieur le Vice-Président Jean-Marie HUBERT

Nous connaissons votre engagement militant au sein de « la banque verte » ainsi que sur le terrain des luttes paysannes et pour le Péyi-Gwadloup. Pourrez-vous nous dire qu’il s’agit d’un bon choix, ou comme l’a dit un autre élu : « je fais confiance au maire de Petit-Bourg. I sav sa i ka fè ». Nous avons du mal à accepter l’idée que vous puissiez cautionner cette dérive qui hypothèque l’Avenir.

Nous Guadeloupéens de ce Collectif contre ce projet de terrain de golf, souhaitons que vous fassiez connaître publiquement votre position sur ce dossier brûlant.

Respectueusement Vôtre

Le COLLECTIF ANTI- GOLF DE MONTAGNE

Petit-Bourg le 01/06/2018

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