PREFET OU GOUVERNEUR !
Le préfet de la Guadeloupe vient de pousser à la démission Jacques Bangou, le maire de Pointe-à- Pitre , après avoir tout fait pour le faire révoquer . Pourtant cette révocation n’avait aucun caractère d’urgence, puisque les élections municipales se tiendront dans quelques mois. D’autant plus que, d’après les griefs qui lui ont été faits, il ne s’agirait pas de malversations, ni de corruption, ni d’enrichissement personnel, mais plutôt de mauvaise gestion. Dès lors, on peut se demander pourquoi cette précipitation, pourquoi cet acharnement ? Acharnement dont le point d’orgue est la diffusion dans la presse, d’ une lettre adressée au ministre de l’intérieur, pour faire pression sur ce dernier, au point d’affirmer qu’un « abandon de la procédure déjugerait et décrédibiliserait l’Etat » ( c’est-à-dire lui). Dans la foulée, le Préfet demande également la dissolution du SIAEAG ( syndicat d’adduction d’eau et d’assainissement ). Certes , personne ne peut affirmer que le Siaeag a rempli sa mission : fournir de l’eau en qualité et en quantité à la population. Mais, là encore, pourquoi cette précipitation, cette façon brutale de régler les problèmes sans prendre en compte les réalités sociales et la dignité humaine. Ne serait-ce que la nécessité de prendre en considération l’avenir des salariés de cette structure. Pourquoi cette précipitation, cette façon autoritaire de régler les problèmes. Y avait-il- urgence dans ces deux cas ?
Pour le cas du maire de Pointe-Pitre, les prochaines élections municipales auront lieu dans moins de huit mois et la liquidation du Siaeeag devrait intervenir au plus tard, lors de la création du syndicat mixte unique en charge de la gestion de l’eau et de l’assainissement. Le préfet, tel un gouverneur estime que décentralisation ou pas, élus ou pas, le pouvoir appartient au pouvoir central, donc à lui ! Implicitement, il considère les élus comme des incapables, qui seraient responsables de tous les maux de la Guadeloupe. Certes, ils ne sont pas exempts de tous reproches, et nous serons les derniers à défendre la gabegie, le manque de sérieux et quelquefois la corruption de certains d’entre eux. Certains cas relevant même de la justice. Mais de là à accepter que le préfet dicte sa loi et joue au justicier, il y a un pas que nous ne saurions franchir. Car, enfin, ces élus ne sont pas seuls responsables de la situation catastrophique de la Guadeloupe. Le chômage massif des jeunes ne date pas de la décentralisation et l’absence d’équipements structurants, non plus ..
- C’est bien l’Etat qui a accordé une dérogation pour l’utilisation du chlordecone, dont on connait maintenant les ravages sur la santé des guadeloupéens.
- C’est bien l’Etat qui « se lave les mains » sur la question de l’eau, en affirmant que la gestion de l’eau n’est pas de sa compétence, alors qu’il perçoit la TVA sur la consommation de l’eau.
- C’est encore l’Etat qui est incapable de gérer la crise sanitaire qui frappe la Guadeloupe, après l’incendie du CHU.
- C’est toujours ce même Etat qui dit aux communes : « débrouillez vous avec les sargasses », alors que ces algues viennent de bien au-delà des rivages, dans la haute mer, donc dans la Zone Economique Exclusive, sur laquelle l’Etat a une compétence exclusive.
- C’est aussi l’Etat qui a vendu notre centrale géothermique de Bouillante à une entreprise privée, empochant à l’occasion 50 millions d’euros, sans aucune compensation pour les collectivités On pourrait citer maints exemples comme ceux là, où l’Etat a failli. Dans ces conditions. nous aurions préféré que le Préfet, se concentre sur les compétences régaliennes de l’Etat et se fasse le relais, auprès du gouvernement, des difficultés et des préoccupations quotidiennes des guadeloupéens.
Alain PLAISIR Président du CIPPA