24/11/2024

La femme, le pouvoir et la société.

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Il n’est pas très loin l’époque ou les femmes pour travailler devaient avoir l’autorisation de leurs maris et souvent leurs salaires étaient versés sur le compte de ces derniers, loin l’époque ou avec condescendance les hommes faisaient une petite place aux femmes dans leurs groupes de décision ou de direction : femme alibi. Depuis plusieurs années, les femmes ont investi de nombreux secteurs de la vie professionnelle, sociale, économique et politique.  Aucun secteur en fait n’est hors de leur champs d’investissement, ce qui permet de se concrétiser au fur et à mesure du temps, la notion d’égalité entre les sexes ; L’éducation, la formation, la volonté de réussir ont permis d’arriver à cette situation ; les mouvements féministes par leurs actions même excessives ont favorisé l’érection de lois qui ont ouvert les champs de ces possibles. Certes des fossés restent encore à combler  pour que l’égalité se concrétise entièrement, par exemple en matière de salaire, ou de réticence   de certains à lever leur prévention obsolète à l’égard de l’autre moitié de l’humanité. Le combat devra être incessant car des cultures entières ont vécu et vivent encore sur le primat de la prééminence sinon la prédominance du masculin.  Cependant il n’est pas rare aujourd’hui de voir la femme occuper de plus en plus de postes de responsabilité dans les domaines variés ; elle a pris le pouvoir ou en tout cas elle occupe des postes à pouvoir et l’exerce sans aucun complexe . Peu de personnes  contestent son autorité à priori mais il n’est pas inhabituel de découvrir, lorsque l’affaire n’est pas bien résolue ou la décision mal engagée, l’insinuation avec  sourire narquois et condescendant sur la féminité qui dirige.

 La Guadeloupe n’est pas hors de l’air du temps. Cependant les femmes actives dans la vie sociale de ce pays, ne constituent pas une nouveauté de la fin du vingtième siècle et du début de ce siècle. La femme guadeloupéenne depuis la création de la nouvelle collectivité humaine guadeloupéenne à partir de l’esclavage a toujours travaillé, porté le groupe familial et mené de nombreux combats pour la promotion guadeloupéenne même si elle a peu été sous les feux de la rampe. Ceci a été fait avec quelque fois beaucoup plus de détermination que les hommes. Les femmes guadeloupéennes n’étaient pas un néant au centre du tout.

 Maintenant «  l’heure d’elles-mêmes » a sonné, peut –on dire en parodiant le fameux mot de Aimé CESAIRE, pour être au centre du pouvoir ; des entreprises, des institutions (CCI, etc.) le barreau, la magistrature, des collectivités locales (mairies, région), des directions de services administratifs, des hautes fonctions de l’Etat (préfectorale), l’Université et la liste n’est exhaustive sont  actuellement pilotés, administrés, commandés par des femmes. Pour un pays machiste dit-on, les femmes ont un rôle important sinon déterminant sur et dans la vie de ce pays. Elles se montrent, travaillent et  relèvent sans conteste le défi qui leur est lancé. Elles le font  avec leur tempérament, leur personnalité, leur culture. L’irruption de la femme dans le pouvoir en Guadeloupe interroge sur la relation  qui se crée avec les hommes dans le quotidien. Indéniablement la relation change et le schéma habituel du primat du mâle n’est plus entièrement de mise ;  l’homme se trouve confronter à la réalité d’un partage plus grand dans les rapports avec la femme par exemple dans les tâches du quotidien ; la participation des hommes devra être plus active et sa présence plus constante. En outre le rapport hiérarchique peut aussi se vivre difficilement et créer au sein de la structure toute espèce de problèmes ingérables et préjudiciable à la bonne marche de la structure. Il n’est pas aussi rare de voir poindre des sous –entendus malsains à propos de la femme qui dirige. Ce ne serait pas sa compétence qui serait à l’origine de l’obtention du poste mais un quelconque passage dans un dédale particulier conduisant à la chambre à coucher. Il est à noter que peu d’observations de cet ordre  ne sont faites lorsqu’il s’agit de la promotion de l’homme. La compétition entre hommes  se vêt peu sinon jamais de ces oripeaux malodorants. En réalité quoique l’on en dise, arriver à l’égalité entre homme et femme nécessite la perte de la prééminence absolue de l’homme et cela ne se fait pas sans difficulté. Celui qui perd quelque chose ou a quelque chose à perdre a toujours plus de difficultés à admettre le changement que celui qui a à gagner avec le changement. La génération des «  post soixante huit », malgré ses discours très ouverts  est resté façonnée par son éducation d’avant soixante huit, car quoique l’on en dise on reste  toujours marqué par son éducation. Il est  certain que la génération actuelle est plus ouverte à une vision moins figée de la relation même si à cause de la crise des discours sur le retour de la femme au foyer voient le jour et que même le «  masculinisme » c’est-à-dire le retour de la domination du mâle se développe dans certains pays. Un long travail d’éducation doit être entrepris pour faire admettre à l’homme ce bouleversement et à la femme l’impérative vigilance et compréhension dont elle doit faire preuve pour emmener l’homme à faire des efforts. Les ruptures à éviter sont à ce prix.

L’exercice du pouvoir par les femmes va –t-il pour autant changer le rapport au pouvoir ? Y aura-t-il une réelle différence entre l’homme et la femme dans l’exercice du pouvoir ? Certains pensent que la nature plus douce de la femme, son souci d’être concrète et de vraiment solutionner le problème qui lui posé plus que de se mettre en avant, le manque d’ego surdimensionné au contraire de l’homme pour qui l’exercice du pouvoir serait un moyen de se mettre en avant, tout cela serait des  éléments qui humaniseraient le rapport au pouvoir. Il ne faut cependant pas oublier que le pouvoir reste le pouvoir avec tous ses jeux pour arriver à le gagner et surtout faire pour ne pas le perdre. Le conquérir demande finesse, subtilité, brutalité, séduction, coup de Jarnac une part d’égocentrisme et un savoir faire pour le garder qui allie dextérité, cynisme, flatterie, la dissimulation qui est un des éléments importants de ces ingrédients. « Qui ne sait pas dissimuler ne sait pas régner » disait un roi de France, LOUIS XI   . MACHIAVEL et son Prince ne sont jamais loin.

  La femme, même si elle y apporte une très petite note personnelle devra utiliser ces ingrédients pour  face à la réalité ; lorsqu’elle devra faire marcher l’entreprise,   faire face à la compétition ou lorsque  recevra ou donnera des ordres, elle  exercera son pouvoir. Les décisions seront prises, les personnes écartées si c’est dans l’intérêt de la structure, du groupe ou de la population. Il s’agit d’exercer le pouvoir et on aurait tort de s’indigner en disant que c’est une femme qui a pris une décision. Le philosophe ALAIN a écrit  « le pouvoir est triste » et on peut ajouter qu’il s’exerce sans trop d’état d’âme que l’on soit homme ou femme.

Cependant l’irruption de la femme dans le pouvoir et dans la vie sociale n’empêche pas l’existence d’une autre réalité triviale, triste et déshonorante pour notre  société ; c’est  notre société aussi qui tolère la violence à l’égard des femmes, les agressions sexuelles contre  leurs corps, comme si leurs corps étaient  simple chose dont on pouvait se servir  avec désinvolture et à sa guise. Alors  pensons et faisons vivre une société dans la quelle au delà du pouvoir de l’un ou de l’autre sexe la responsabilité collective et individuelle prend toute sa place car la façon de vivre le monde dépend de la vision que l’on a de l’homme.

Robert Valérius

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